Témoignage de :

Comment je me suis faite vacciner

7 juin 2021

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Bientôt 50 ans, pas de problèmes de santé particuliers, soignante de métier.
Pendant tout le premier confinement, je travaille à domicile, avec masques, gants, gel, aucun cas de contamination.
Pour l'un de mes patients, une femme démente mais avec qui une communication hautement délirante et parfois très drôle est possible, le masque devient rapidement une source de problèmes : agressivité croissante, incapacité à reconnaître les divers intervenants, prostration.
Au bout d'un mois, je tombe le masque, les sourires reviennent et nos dialogues insensés et joyeux aussi.
Jamais vaccinée contre la grippe, je pars du principe que les précautions d'hygiène standard sont suffisantes. J'ai eu la grippe, elle m'a jetée au tapis, c'est terrible la grippe, c'est vrai. Si j'en sens les symptômes, je ne vais pas travailler, je reste à transpirer ma fièvre au lit, à le sentir tourner sous moi et à dormir entre deux mauvais rêves et deux cuillères de miel/citron/vinaigre, je cuve et voilà.
Une affection respiratoire virale saisonnière qui passe.
Un vaccin contre la Covid ? Une thérapie génique ?
Je n'en veux pas, même raisonnement que pour la grippe.
Si je suis prise en charge tôt, ça ira.
Le printemps arrive, mon compagnon va se faire piquer, moi non, je ne veux pas.
Un vieil ami (60 ans) m'appelle, pas de nouvelles depuis début mars : il est en convalescence, sort de 4 semaines de réa, intubation etc. Perte de capacité respiratoire à hauteur de 40%. Mal diagnostiqué : diarrhée, toux, essoufflement, sat' à 91%: rentrez chez vous, ça va passer qu'on lui dit. Quelques jours plus tard, pinpon, pinpon, sat' à 60%, hosto etc.
Je dois partir une semaine pour une formation cet été. Prendre le train, voir du monde, etc.
Avec chéri, on s'engueule un peu, il ne comprend pas, je suis idiote ou quoi ? J'écoute trop certains médias ? J'suis zinzin ou quoi ?
Alors, je comprends. Je vais lui faire plaisir, à lui, à mon ami qui a failli crever.
OK pour la thérapie génique qui protège contre les formes graves mais n'empêche pas de la contagiosité.
OK pour un truc dont on ne sait pas les effets sur 1 an, 5 ans ou 10.
(Heureusement mes enfants sont grands et décident pour eux-mêmes, jamais je ne les y aurais emmenés s'ils étaient encore petits).
Donc, oui, OK, j'y suis allée. J'ai un papier avec un QRcode, officiel et tout.
Mais je demande au médecin d'inscrire la vaccination dans mon carnet en papier.
Il y aura la seconde injection en Juillet.
Et puis, plus jamais.
Qu'il mute, qu'il varie, qu'il continue à exister.
Finalement, c'est ça qui compte le plus: rester adaptable, souple, fluide.
Ne jamais présenter un téléphone dernière génération avec QRcode covid-free certifié au resto, à l'entrée du TGV, au guichet de l'hôpital, au concert.
Plutôt sortir de mon sac, des papiers dits « d'identité » avec une vieille photo, périssables et parfois introuvables, un carnet avec des feuilles dedans et inscrits au stylobille, les numéros de lot et le tampon du docteur à côté.
Ne pas s'entêter, ne pas s'identifier trop à ses idées, ne pas avoir de dogmes, mais continuer à chercher l'équilibre, dans les soins donnés, dans les risques pris, dans l'intentionnalité des gestes nécessaires à la cohésion et au maintien du lien.
Rester souple, fluide, en mouvement, mais pas traçable, pas géolocalisable, imprévisible

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