Témoignage de :

Lettre à mon employeur et autres responsables

16 octobre 2021

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A l'attention de :
Mme, Mr l'inspecteur du travail
Mesdames, messieurs responsables de l'ARS
Mr J. directeur général de l'A...
Mesdames et messieurs membres du Comité d'Entreprise ASEI
Mr M. directeur bassin
Mesdames et messieurs de l'équipe de direction du centre le c.

Mesdames, Messieurs,

Par la présente je souhaiterais exprimer ma sidération et ma tristesse devant la manière dont nous salariés de l'ASEI sommes traités, à l'occasion de l'application de cette loi -à mes yeux sans fondement- impliquant l'obligation vaccinale des soignants.
La première des conséquences de cette application -et peut-être la plus aberrante lorsqu'on la rapproche des valeurs et du discours qui sont prônés par notre association est de venir mettre à mal la continuité des soins pour les enfants et les familles que nous accompagnons. Sans continuité des soins, une approche thérapeutique, éducative, pédagogique, intégrative n'est tout simplement pas possible.
Pour qui travaille au quotidien avec ces enfants, ces familles c'est une évidence.
Ajoutons à cela que le contexte sanitaire, les confinements successifs ont aggravé les problématiques des jeunes que nous accompagnons, ont amené du retard dans le travail que nous tentons de mettre en place avec eux.
Le fait que les professionnels sur lesquels ils ont appris ou apprennent à s'étayer disparaissent ainsi de leur quotidien, sans aucune perspective de retour est une nouvelle occasion d'abîmer un peu plus leur sentiment de sécurité affective, leur rapport à l'autre. Il n'y avait pas de danger immédiat à prendre le temps du départ, de l'explication...
Il est facile à comprendre qu'en malmenant ainsi des salariés, ce sont les jeunes et les familles pour lesquels ils représentent un repère, un appui qui sont par conséquence malmenés.
L'autre conséquence de cette application brutale de la loi est l'impact sur nous, salariés.
Nous avions déjà compris pour beaucoup que l'heure n'était plus à l'intérêt pour la qualité du travail que nous nous efforcions de faire avec les jeunes. Pour ma part, l'année qui vient de s'écouler d'une brutalité inouïe, en lien avec la réorganisation d'un service (ce qui bien sûr n'est pas le problème en soi) et avec la manière dont celle-ci a été posée, menée, pensée, m'avait amené à commencer bien avant un travail de deuil s'agissant du sens de mon travail et du fait que le parcours positif des jeunes n'est plus le seul objectif qui anime notre association.
Ce que je regrette fortement.
Ce n'est donc pas la douleur de toutes ces années d'engagement, de temps et d'énergie investis dans mon travail qui semblent ne pas avoir existés dans la manière dont je suis traitée lors de cet acte de suspension, renvoyée chez moi comme une malpropre, qui est la plus difficile.
Non ce qui m'envahit, me fait perdre le sommeil ces derniers temps, c'est que nos collègues qui ont eux poursuivi, lors du premier confinement, leur travail en présentiel auprès des "usagers", au moment où personne ne semblait connaître le degré de dangerosité du virus ; C'est que ces collègues qui ont pris tous les risques (celui de mourir lorsque nous étions tous à l'abri derrière nos écrans), sous prétexte qu'ils refusent de se soumettre à cette loi – à mes yeux sans fondement- vous les traitiez de la sorte.
Ce qui m'abîme, c'est que des responsables de votre envergure qui devriez être des "modèles" en matière de valeurs humanistes, de bientraitance, de tolérance, nous n'ayez marqué aucune hésitation à emboîter le pas d'une gestion autoritariste et brutale de notre gouvernement. Voilà ce qui m'atteint au plus profond je crois, c'est qu'en observant votre manière d'agir, de vous comporter avec les professionnels de terrain que nous sommes,
j'ai mesuré l'extrême fragilité de l'incarnation de ces valeurs qui devraient encadrer, "limiter" notre pratique professionnelle à tous et la vôtre plus particulièrement. Je crois que c'est ce constat qui me tient éveillée et dans la douleur...
Que quelques-uns avaient oublié leurs idéaux en route, je le savais. Mais que vous vous empresseriez d'emboîter le "pas guerrier" comme cela, d'un seul homme ça non je ne le savais pas possible.

Une psychologue clinicienne

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