Témoignage de :

Lettre à mon université

25 septembre 2021

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Dans certains pays, il faut être riche pour pouvoir étudier ; dans d’autres, il faut être vacciné. Ou harcelé.

Monsieur le Recteur, Vous ne me connaissez pas : je ne suis qu’une petite étudiante insignifiante, noyée dans la masse. J’ai 31 ans, je suis française, et il y a trois ans, j’ai décidé de tout quitter, mon travail, mes amis, et même mon pays, pour venir étudier en Suisse au sein de votre université, parce qu’elle est réputée abriter l’une des meilleures facultés de traduction.

En effet, je n’ai rien à redire sur la qualité des cours ni sur le sérieux de l’établissement. En revanche, je m’interroge quant aux nouvelles directives concernant l’accès à l’enseignement en ces temps perturbés.

Hier soir, vous nous avez adressé un mail dans lequel vous nous informez qu’à compter du 13 septembre, seules les personnes en mesure de présenter un « certificat covid » auront accès : aux salles de cours, à la bibliothèque, aux salles informatiques, à la cafétéria, ainsi qu’à toutes les activités sportives et culturelles.

Bien. Je suis heureusement déjà assise sur mon canapé, ce qui m’évite de tomber par terre. Une fois le choc encaissé, j’essaie de me ressaisir et d’analyser la situation avec calme. Étant formellement opposée à votre pass nazitaire, je me retrouve alors seule, très seule, face à de nombreuses interrogations :

- Vous dites que les cours seront enregistrés « pour ceux qui seraient empêchés d’y assister », mais qu’entendez par-là, Monsieur le Recteur ? Refuser de se soumettre à un test à la fiabilité douteuse ou à une injection expérimentale, potentiellement dangereuse, est-il considéré comme un « empêchement » ? - Et comment se dérouleront les travaux de groupe, quand presque tous mes petits camarades seront sur place et que je serai l’une des seuls à y participer derrière mon écran ?

Parce qu’en Master, nous en aurons beaucoup, des travaux de groupe. Bien sûr, les notes compteront pour l’obtention de mon diplôme (qui lui-même déterminera la possibilité ou non d’entreprendre un doctorat par la suite).

- Même problème avec les présentations orales : serai-je autorisée à faire mes exposés à distance ? Parce que ne pas être en mesure de présenter son travail, c’est zéro.

- Et qu’en est-il des professeurs qui n’enregistrent pas leurs cours ? Parce que oui, il y en a ! Oh, les vilains rebelles qui ne respectent pas vos consignes…

- Ensuite, comment étudier – et rédiger un mémoire – sans avoir accès à la bibliothèque ? Voilà un grand mystère… ! Car vous ne le savez peut-être pas, Monsieur, mais les ressources en ligne de votre université sont encore bien (trop) limitées.

- Pour ce qui est de la cafétéria, je n’y allais de toute façon déjà plus depuis que vous aviez mis en place votre politique de traçage, ainsi que le port du masque généralisé dans tous les locaux. Idem pour les activités sportives et culturelles. RIP.

- Enfin, comment se dérouleront les examens pour les personnes ne possédant pas de pass, puisque vous refusez que les épreuves se tiennent une fois encore à distance ? Par ailleurs, vous osez affirmer que cette décision a été prise « pour garantir l’accès au plus grand nombre » aux cours en présentiel et aux infrastructures. Au plus grand nombre, peut-être, mais pas à tous.

Pour ma part, je refuse catégoriquement de me faire tester, car j’associe ce geste à un viol. Rien que la vue d’une personne en train de se faire triturer le nez ou le fond de la gorge me rend littéralement malade et me donne des crises d’angoisse.

Je ne peux donc pas imaginer une seule seconde m’infliger cette torture psychologique toutes les 48 h. Alors, en résumé, si je souhaite poursuivre mes études, pour lesquelles j’ai déjà consenti à tellement de sacrifices, et vivre un jour de ma passion, le rêve de ma vie, dois-je pour cela accepter de vendre mon âme au diable ?

Je suis consciente que mon témoignage ne changera pas le monde. Il ne vous fera pas non plus changer d’avis. Toutefois, je tiens à ce qu’il reste au moins quelque part une trace écrite du chantage immonde que vous faites subir à l’ensemble de la communauté universitaire.

Vous êtes répugnant, Monsieur F., et je rêve de pouvoir un jour vous le dire en face.

Je vous prie de croire, Monsieur le Recteur, en l’expression de mon mépris le plus profond et de mon dégoût bien sincère.

 

Sophie

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